martes, septiembre 13, 2005

Harboring feelings


Harboring feelings
Originally uploaded by lunita.


Le Bateau Ivre

Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentais plus tiré par les haleurs :
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

J'étais insoucieux de tous les équipages,
Porteur de blés flamands et de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages
Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.

Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
Je courus ! Et les Péninsules démarrées
N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots
Qu'on appelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l'oeil niais des falots !

Plus douce qu'aux enfants la chair des pommes sûres,
L'eau verte pénétra ma coque de sapin
Et des taches de vins bleus et des vomissures
Me lava, dispersant gouvernail et grappin.

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De la Mer, infusé d'astres, et lactescent,
Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif parfois descend ;

Où, teignant tout à coup les bleuités, délires
Et rythmes lents sous les rutilements du jour,
Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres,
Fermentent les rousseurs amères de l'amour !

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants : Je sais le soir,
L'aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
Et j'ai vu quelques fois ce que l'homme a cru voir !

J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très-antiques
Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !

J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,
La circulation des sèves inouïes
Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !

J'ai suivi, des mois pleins, pareilles aux vacheries
Hystériques, la houle à l'assaut des récifs,
Sans songer que les pieds lumineux des Maries
Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs !

J'ai heurté, savez-vous, d'incroyables Florides
Mêlant aux fleurs des yeux des panthères à peaux
D'hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides
Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux !

J'ai vu fermenter les marais énormes, nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan !
Des écroulement d'eau au milieu des bonacees,
Et les lointains vers les gouffres cataractant !

Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises !
Échouages hideux au fond des golfes bruns
Où les serpents géants dévorés de punaises
Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums !

J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.
- Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades
Et d'ineffables vents m'ont ailé par instant.

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux
Montait vers moi ses fleurs d'ombres aux ventouses jaunes
Et je restais, ainsi qu'une femme à genoux...

Presque île, balottant sur mes bords les querelles
Et les fientes d'oiseaux clabotteurs aux yeux blonds.
Et je voguais lorsqu'à travers mes liens frêles
Des noyés descendaient dormir à reculons !

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repéché la carcasse ivre d'eau ;

Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur ;

Qui courais, taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les juillets faisaient couler à coups de trique
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l'Europe aux anciens parapets !

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :
- Est-ce en ces nuits sans fond que tu dors et t'exiles,
Million d'oiseaux d'or, ô future vigueur ? -

Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.
Toute lune est atroce et tout soleil amer :
L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !

Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
Un enfant accroupi plein de tristesses, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
Enlever leurs sillages aux porteurs de cotons,
Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes,
Ni nager sous les yeux horribles des pontons.

---Arthur Rimbaud

Thanks to Yuré for this épigraphe opportune.

2 Comments:

Blogger L. YURÉ said...

EL BARCO EBRIO
Jean-Arthur Rimbaud

Cuando descendía los Ríos impasibles,
no me sentí guiado por los sirgadores:
los Pieles Rojas chillones los habían tomado por blancos,
habiéndolos clavado desnudos en postes de colores.

Me eran indiferentes todas las tripulaciones,
carguero de trigos flamencos o algodones ingleses.
Cuando con mis sirgadores terminó ese alboroto,
adonde yo quería ir me dejaron descender los Ríos.

En los chapoteos furiosos de las mareas,
yo, el otro invierno, más sordo que los cerebros de los niños,
¡corrí! Y las Penínsulas desamarradas
no han sufrido caos más triunfantes.

La tempestad ha bendecido mis despertares marítimos.
Más ligero que un corcho he bailado sobre las olas
a las que llaman rodadoras eternas de víctimas,
¡diez noches, sin añorar el ojo memo de los faros!

Más dulce que para los niños la carne de manzanas ácidas,
el agua verde penetró en mi cáscara de abeto
y de manchas de vinos azules y vómitos me lavó,
dispersando timón y rezón.

Y desde entonces, me he bañado en el Poema
del Mar, infundido de astros, y casi lechoso,
devorando los azures verdes; flotación lívida
y arrebatadora, un ahogado pensativo a veces desciende.

Donde, tintando de golpe las azulinas, delirios
y ritmos lentos bajo las rutilancias del día
más fuerte que el alcohol, más vastas que nuestras liras,
¡fermentan las rubicundeces amargas del amor!

Yo conozco los cielos rajándose en relámpagos, y las trombas
y las resacas y las corrientes: yo conozco la tarde,
el Alba exaltada como un pueblo de palomas,
¡y he visto algunas veces lo que el hombre ha creído ver!

He visto al sol bajo, manchado de horrores místicos,
iluminandolargos coágulos violetas,
parecidos a actores de dramas antiquísimos
¡las olas rodando a lo lejos sus temblores de álabes!

He soñado la noche vrede de nieves delumbrantes,
besar subiendo los ojos de los mares con lentitudes,
la circulación de sabias inauditas,
¡y el despertar amarillo y azul de fósforos cantores!

He seguido, meses enteros, semejante a vaquerías
histéricas, al oleaje en el asalto de los arrecifes,
¡sin pensar que los pies luminosos de Marías
pudieran forzar el mono de Océanos asmáticos!

¡He chocado, ¿sabéis?, contra increíbles Floridas
mezclando a las flores ojos de panteras con pieles
de hombres! ¡Arco iris tensos como bridas
bajo el horizonte de los mares, en glaucon rebaños!

He visto fermentar los marjales enormes, nasas
donde se pudre en los juncos ¡todo un Leviatán!
¡Derrumbamientos de aguas en medio de bonanzas,
y las lejanías hacia los abismos en cataratas!

Glaciares, soles de plata, olas nacaradas, ¡cielos de brasas!,
encalladuras ocultas al fondo de golfos oscuros
donde las serpientes gigantes devoradas por los chinches
caen, ¡árboles torcidos, con negros perfumes!

Yo hubiera querido mostrar a los niños estos dorados
del oleaje azul, estos peces de oro, estos peces cantantes.
-Espumas de flores han mecido mis fugas de las radas
e inefables vientos me han alado por instantes.

A veces, mártir cansado de los polos y zonas,
el mar cuyo sollozo hacía mi balanceo suave,
subía hacia mí sus flores de sombra con ventosas amarillas
y yo me quedaba, igual que una mujer de rodillas...

Casi isla, bamboleando sobre mis bordes las querellas
y el estiércol de pájaros ladradores de ojos rubios.
Y yo bogaba, cuando a través de mis lazos frágiles
los ahogados bajaban a dormir, ¡a reculones!

Y yo, barco perdido bajo los cabellos de las ensenadas,
arrojado por el huracán en el éter sin pájaro,
yo cual los Monitorer y los veleros de las Hanses
no hubieran pescado el esqueleto borracho de agua;

Libre, humeante, montado por brumas violetas,
yo que horadaba el cielo enrojecido como un muro
que lleva, confitura exquisita para los buenos poetas,
líquenes de sol y mocos de azur;

que corría, salpicado de lúnulas eléctricas,
plancha loca, escoltado por hipocampos negros,
cuando los julios hacían hundirse a garrotazos
los cielos ultramarinos de ardientes entonelamientos;

yo que temblaba, oyendo gemir a cincuenta leguas
el celo de los Béhémots y los Maelstroms espesos,
hilador eterno de inmovilidades azules,
¡añoro la Europa de los antiguos parapetos!

¡Yo he visto archipiélagos siderales! e islas
en las que los cielos delirantes están abiertos al remero:
-¿es en estas noches sin fondo cuando duermes y te exilas,
millón de pájaros de oro, oh futuro Vigor?

¡Pero, cierto, que mucho he llorado! Las Albas son dolorosas.
Toda luna es atroz y todo sol amargo:
el acre amor me ha hinchado torpores embriagantes.
¡Oh que mi quilla estalle! ¡Oh que desaparezca en el mar!

Si yo deseo un agua de Europa, es la de la charca
negra y fría donde hacia el crepúsculo embalsamado
un niño en cuclillas lleno de tristezas, suelta
un barco frágil como una mariposa de mayo.

Yo ya no puedo, bañado por vuestras languideces,
oh olas, seguir la estela de los cargueros de algodones,
ni atravesar el orgullo de las banderas y los gallardetes,
ni nadar bajo los horribles hojos de los pontones.

5:58 a.m.  
Blogger ilana said...

Malditas palabras! no sé que decir mas diré que me vas conociendo y te agradezco el poema lanzado al aire, al espacio...
le has puesto el perfecto epígrafe.

5:33 p.m.  

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